Je me consacre à l’étude des signes. Les domaines auxquels je m’intéresse sont variés. Cela peut être, comme on pourra le lire ci-dessous, la linguistique. Un autre champ très important pour moi est celui de la médecine. Je me penche alors sur l’analyse des symptômes, ces signes par lesquels se manifestent les maladies et qui constituent une des multiples façons d’aborder la médecine.
Le domaine que je voudrais présenter ici est celui de la communication visuelle. Là aussi, le champ est large : illustration, photographie, publicité, infographie… Les pensées, les idées s’expriment avec des mots, des phrases, des textes. Elles s’expriment aussi avec des dessins, des figures, ou autres représentations visuelles. On dit parfois qu’une image vaut parfois mieux que des mots. C’est vrai si l’image est bien choisie, bien construite.
Voilà pourquoi je trouve ma place sur ce blog, en compagnie de la statistique. L’analyse des données conduit à construire des tableaux de chiffres. Un moyen de rendre un tableau plus parlant est d’en faire une représentation graphique : diagrammes en barres, courbes d’évolution, diagrammes sectoriels, cartes thématiques, etc. pour ne citer que les plus courants.
Le sens de la vue
La construction d’une telle représentation s’appuie sur quelques règles de base. Ces dernières se fondent sur comment le cerveau interprète l’image perçue par les yeux. Car évidemment, tout est question d’interprétation. La théorie distingue différentes variables visuelles : la forme, la taille, la couleur, la valeur, l’orientation. Exemple trivial : pour montrer une quantité, j’utilise la taille d’un symbole, qui variera en fonction de la quantité à représenter.
Attention toutefois : c’est de préférence la surface du symbole qui est proportionnelle, plutôt que la longueur pour un rectangle ou le diamètre pour un cercle.
Un autre vaste sujet est celui du choix des couleurs. C’est bien connu, « les goûts et les couleurs, cela ne se discute pas ». Cependant, certaines couleurs sont associées à des représentations symboliques. Par exemple, le rouge symbolise le « chaud » tandis que le bleu figure le « froid ». En cartographie topographique, le bleu est associé à l’eau, le vert, à la végétation.
Aux sources de la langue
Connaissez-vous cette vague impression de gêne, au moment d’agir, ce quelque chose qui retient en raison de considérations de règles qu’il conviendrait de respecter ? Une expression l’exprime : « avoir un scrupule », ou même des scrupules, car, en général, ils ne sont pas tout seuls. Savez-vous que « scrupule » vient du latin scrupulus, qui signifie « petit caillou » ? Le genre de celui que l’on peut avoir dans la chaussure, qui freine le pas et empêche de tracer son chemin…
Mon nom à moi vient du grec, l’autre langue ancienne qui constitue, avec le latin, une des belles sources de notre langue française. Notre langue est vivante et s’abreuve aujourd’hui à bien d’autres fontaines. Feuilleter un dictionnaire est un voyage sans fin où l’on découvre que la langue s’inspire souvent de représentations symboliques, tel le caillou dans la chaussure. C’est aussi l’objet de mon étude, qui est celle des signes. En grec, cela donne semeion pour « signe » et logos pour « étude », donc « sémiologie ». Pas étonnant que linguistique et sémiologie aillent souvent ensemble.
Un dégradé de couleurs du clair au foncé est associé à des quantités croissantes : dans un dégradé, c’est la valeur de la couleur qui varie, plus que sa teinte, même si le rouge a une valeur plus forte que le jaune. Si un dégradé du jaune au rouge fonctionne bien, c’est parce que deux variables visuelles sont impliquées : couleur et valeur.
Accessibilité et simplicité
Il convient d’être attentif aussi aux usages liés à la culture. Par exemple, le blanc est associé en Occident au vide ou à la pureté, alors qu’il représente la couleur du deuil en Chine, ce qui n’est au fond pas si éloigné, puisque le deuil, c’est l’absence, le vide. Les couleurs ne sont pas perçues de la même manière par chaque personne. Certaines déficiences visuelles constituent même un handicap. Il convient de les prendre en compte si l’on vise à respecter un cadre d’accessibilité.
Ce n’est pas l’objet d’un simple billet de blog de plonger dans le détail des règles de sémiologie. Je voudrais juste en mettre une en avant, servant de socle à toutes les autres. Elle se résume en très peu de mots : l’art de faire simple ! Une « bonne » représentation graphique doit délivrer un message clair. À l’inverse, un graphique surchargé, présentant trop d’informations à la fois, a peu de chance d’atteindre son objectif, sauf si celui-ci est d’intimider le lecteur et de déployer un grand savoir-faire technique ! Ne pas se laisser griser par les technologies qui permettent aujourd’hui de construire en quelques clics des images spectaculaires et hautes en couleurs. Prendre le temps de construire des représentations véritablement chargées de sens.
Des livres entiers sont consacrés à mon sujet, dont voici quelques références :
- Sémiologie Graphique. Les diagrammes, les réseaux, les cartes de Jacques Bertin
- La graphique et le traitement graphique de l’information de Jacques Bertin
- La représentation des données géographiques : statistiques et cartographie de Michèle Béguin et Denise Pumain
- Manuel de cartographie – Principes, méthodes, applications de Nicolas Lambert et Christine Zanin
- The Visual Display of Quantitative Information de Edward Tufte
Voilà également quelques liens pour aller plus loin :
- Insee – Guide de sémiologie cartographique
- Géoligne – bibliothèque de ressources pédagogiques de l’ENSG – Sémiologie graphique et conception cartographique
- Carnet NéoCartoGraphique – le Manifeste des cartographes
Étudier à partir de livres ou de tutoriels, c’est bien, apprendre au cours d’une formation animée par des personnes compétentes, c’est encore mieux. Il est possible pour cela de faire appel à Icem7, dont les experts ont plus de 30 ans de métier dans ce domaine.
Pour lire les autres parutions de ma série de portraits :